Flash Actu N°63
- On 18 novembre 2019
LA BAISSE DU BESOIN EN CAPITAL SOLVABILITÉ 2 DES INVESTISSEMENTS ACTION DE LONG TERME (LTEI)
Dans le cadre des mesures de simplification de Solvabilité 2 étudiées par l’EIOPA en 2018, la Commission a publié le règlement délégué 2019/981 le 8 mars 2019 modifiant le règlement délégué Solvabilité 2 (et donc d’application directe) en reprenant certaines des recommandations de l’EIOPA. L’une des mesures adoptées concerne l’introduction d’un choc actions réduit à appliquer à des investissements dits de « long terme » (LTEI pour Long Terme Equity Investments).
DE QUOI S’AGIT-IL ?
Poussée par la France afin d’éviter que Solvabilité 2 n’amène les assureurs à freiner leurs investissements dans l’économie dite « réelle », cette mesure concerne les actions de type 1 comme de type 2 pourvu qu’elles soient cotées dans l’Espace Economique Européen (EEE) ou qu’elles aient leur siège dans l’un de ses états membres.
Ces actions bénéficieraient d’un choc de 22% sur la valeur de marché au lieu de 39% / 49% + ajustement symétrique. En cette période de taux historiquement bas qui pèse sur les taux de couverture des assureurs, elle pourrait constituer un levier intéressant.
LES CONDITIONS D’ELIGIBILITE
Le règlement stipule un certain nombre de conditions d’éligibilité dont la lecture pourrait laisser place à interprétations. L’Institut des Actuaires, conjointement avec la Direction Générale du Trésor, ont livré la leur courant septembre. Décryptage.
Identification des titres : Les investissements en actions concernées et leur période de détention doivent être clairement identifiées, ce qui exclut les UC dont la période de détention est entièrement à l’initiative de l’assuré.
Adossement : Ces investissements en actions ont vocation à s’inscrire dans un portefeuille d’actifs lui-même qualifié de portefeuille de long terme censé couvrir un portefeuille d’engagements d’assurance identifié. Toutefois, l’adossement n’est pas à respecter au sens strict du cantonnement réglementaire. De plus, si les actions de long terme sont à identifier titre par titre, les autres titres du portefeuille de long terme peuvent se suffire d’une définition moins stricte telle que « X% de l’ensemble des obligations ».
A noter que la contrainte d’adossement en face d’engagements d’assurance exclut tout portefeuille d’actifs en face de fonds propres.
Gestion du portefeuille : Cet adossement entraîne une « organisation et une gestion séparée de ce portefeuille ». Toutefois, la seule précision que la norme apporte quant à cette gestion séparée est l’impossibilité d’utiliser ces actifs « pour couvrir des pertes résultant d’autres activités de l’entreprise ». Sur cette base, plusieurs interprétations pourraient émerger et celle de l’Institut consiste, en pratique, à n’interdire que les transferts d’actifs pour payer des pertes d’autres portefeuilles et donc à autoriser par exemple, la mutualisation de la participation aux bénéfices avec d’autres portefeuilles ou même la constitution de ce portefeuille de long terme au sein d’un actif général à partir du moment où la pratique de gestion actif/passif « veillerait à identifier des actifs destinés à couvrir exclusivement certains types d’engagements ».
Taille des portefeuilles : Ni le portefeuille d’actifs ni le portefeuille d’engagements ne peuvent représenter plus de la moitié du bilan.
Détention des action long terme : La période de détention moyenne des investissements en actions de long terme doit être d’au moins 5 ans. Toutefois, une interprétation qualifiée de « souple » par l’Institut consisterait à autoriser des opérations d’achats-ventes permettant de constater comptablement des plus ou moins-values sans que cela ne diminue la période de détention moyenne.
Pour être considérés comme des investissements en actions de long terme, il est nécessaire que l’entreprise soit en mesure de montrer qu’elle peut garantir qu’elle peut éviter pendant au moins 10 ans la vente forcée de ces titres, et ce même en situation de tension. La « situation de tensions » n’étant pas précisée, les hypothèses du (des) scénario(s) redouté(s) ORSA semblent appropriées pour effectuer les projections permettant de satisfaire cette condition.
A noter également que la notion de « vente forcée » s’entend pour des raisons de liquidité afin d’honorer les engagements de la compagnie. Les allers-retours et les cessions pour respect d’une allocation cible (sous réserve de garder 5 ans de durée moyenne) ne sont donc pas bloquant.
Contrôle interne : Un dispositif de contrôle interne permettant de vérifier le respect des différentes conditions énumérées devra accompagner l’application du choc actions long terme.
Nature des titres : Les actions détenues en direct sont concernées ainsi que les fonds eux-mêmes dès lors que les gestionnaires des fonds sont agréés dans l’EEE et qu’ils font partie des types de fonds suivants : fonds d’entreprenariat social éligibles, fonds de capital-risque éligibles, fonds d’investissement alternatifs de type fermé ne recourant pas à l’effet de levier, ou fonds européens d’investissement à long terme.
Approbation du superviseur : Une approbation préalable ne serait pas requise bien qu’un dossier de justification soit à prévoir pour être tenu à disposition du superviseur.